Sud-ouest : Gaillac, le vin au féminin
Gaillac est une appellation étonnante du sud-ouest. Authentique, attachée à ses racines, elle est l’une des seules à pouvoir proposer un vin différent pour chacun des jours de la semaine : blanc perlé, blanc sec, effervescent, blanc doux, rosé, rouge souple et rouge tannique. Bien que l’expression des tanins ne soit pas le point fort et des terroirs, et des cépages existants, la quasi-totalité des vignerons a su raison garder dans la course à l’extraction, ce qui vaut à Gaillac d’être qualifié d’AOC féminine. Les prix permettent de trouver de véritables perles noires.

La ville d’Albi, proche du vignoble de Gaillac et récemment promue au patrimoine mondial de l’UNESCO, assure de bien jolies balades…
SITUATION
Le vignoble de Gaillac se situe dans le département du Tarn, à la limite des départements de la Haute-Garonne et du Tarn-et-Garonne, dans une région tantôt accidentée, tantôt vallonnée, pleine de villages bucoliques, et de bastides typiques de la région. La gastronomie locale est réputée, essentiellement dans la production de foies gras, de porc et de miel. Plus généralement, les vins de Gaillac font partie de la grande région du sud-ouest.
HISTOIRE
Le vignoble gaillacois est apparu bien avant celui du Bordelais, vers le premier siècle avant J.C. Mais la région était surtout réputée pour ses amphores de Montels, dont des vestiges permettent d’en retrouver trace depuis l’Espagne jusqu’au nord de l’Ecosse.
La ville de Gaillac naît en 972. Mis rapidement sous la protection de l’abbaye de Saint-Michel, les moines bénédictins se mirent immédiatement à organiser le vignoble. Dès le IXème siècle, les patientes sélections commencent à porter leurs fruits, et le vin de Gaillac commence à s’exporter. Au XIIIème siècle, Raymond VII, comte de Toulouse, créa l’un des premiers décrets d’appellation de l’histoire du vin de France, et le poète Auger Gaillard chantait les louanges du Gaillac pétillant, existant bien avant le Champagne.
Plus tard, Henri III et Louis XIV en firent un vin présent à la cour. Au XVIIème siècle, les vins du coq (les fûts de Gaillac étaient marqués au feu d’un coq, authentifiant leur provenance) jouissaient d’une excellente réputation.
Le vignoble a énormément souffert de la crise du phylloxéra et a eu beaucoup de peine à s’en remettre. Aujourd’hui, le vignoble s’est considérablement modernisé, même si l’appellation peut paraître « confuse » dans l’idée du consommateur. L’aire de délimitation a été délimitée en 1922, l’AOC pour les blancs accordée en 1938, et en 1970 pour les rouges. Afin de se donner une image de marque, une bouteille a été créée, et ne peut embouteiller que les vins produits dans la zone de production du Gaillacois.

La spectaculaire cathédrale Sainte-Cécile d’Albi est probablement l’un des plus beaux monuments de France.
GEOLOGIE
Le terroir de Gaillac se divise en quatre zones principales :
• Les terrasses de la rive gauche au sud de Gaillac. Ce terroir s’étend sur une trentaine de kilomètres entre Florentin et Couffouleux. Le sol est pauvre et constitué de galets, de graviers et de sable ; les rendements y sont donc faibles. L’altitude est basse, et c’est ici le terroir privilégié des rouges, généreux et riches
• Les coteaux de la rive droite au nord de Gaillac. Délimitée par la Vère, cette vaste zone s’étend de Castelnau-de-Lévis à l’ouest jusque Rabastens à l’ouest. Le secteur de Labastide, Bernac et Sainte-Croix, argilo-calcaire et haut en altitude, est propice aux vins rouges. Plus au nord, le plateau calcaire de Cestayrols et Castanet donne de la finesse aux vins. Les coteaux de Montels donnent de la fraîcheur. Les vendanges sont plus tardives. C’est le secteur des vins blancs et perlés. Au centre de la rive droite, les coteaux de Gaillac aux molasses argilo-calcaires avec des poches d’argile et de sable, donnent des vins ronds et charpentés pour les rouges, et des blancs souples et élégants. L’exposition plein sud et l’action de l’Autan y sont pour quelque chose. Enfin, les coteaux de Rabastens et Lisle-sur-Tarn, donnent des rouges charpentés et chauds, aux tanins fondus, et des blancs délicats.
• Le plateau cordais s’étend au nord de la rive droite. L’altitude est élevée (jusque 300 mètres) et est donc le secteur le plus tardif du Gaillacois. Les vendanges ont lieu presque 15 jours après les autres secteurs. Cependant, les raisins profitent plus longtemps du soleil et cette maturité tardive associée à l’exposition sud permet d’obtenir une richesse différente des composants du raisin.
• Le noyau de Cunac est constitué d’argile graveleuse, réussit bien aux cépages rouges, notamment le gamay pour l’élaboration des primeurs.
CLIMAT
Le Climat est influencé par l’Atlantique, avec des printemps et des hivers humides, des étés chauds et des longs automnes. Toutefois, l’influence méditerranéenne est indéniable, avec des étés plus chauds, comme à Fronton et Cahors, mais aussi des changements météorologiques plus variables.
CULTURE
L’appellation couvre 2.500 hectares, répartis sur 73 communes pour une production de 165.000 hectolitres environ. On y retrouve une centaine de domaines, et trois caves coopératives. La variété des terroirs et l’ancienneté du vignoble permettent à Gaillac de présenter un encépagement varié et traditionnel.
Les cépages sont aussi nombreux, et bien typiques à leur région, à savoir :
Pour les vins blancs :
• Le Mauzac : c’est un cépage traditionnel du Gaillacois, à multiple facettes. Il excelle dans l’élaboration de nombreux vins blancs: blanc sec, blanc doux, effervescent. Il se caractérise principalement par des arômes rappelant la pomme et la poire. Il donne des vins tendres à faible acidité, et il existe de véritables « merveilles » en Mauzac pur. Ce cépage ne se trouve qu’à Gaillac et à Limoux. Il possède en effet une aptitude spéciale à l’élaboration des mousseux, mais ne permet pas de vins de garde.
• Le Len de l’El : son nom vient de la traduction LOIN DE L’OEIL. Les anciens l’appelaient ainsi parce que la grappe est munie d’un d’un pédoncule très long et le raisin est donc « loin de l’œil ». On ne le retrouve qu’à Gaillac. Ses arômes sont zestés, floraux et il apporte fraîcheur et souplesse au vin.
• Le Sauvignon blanc, l’Ondenc, le Sémillon et la Muscadelle viennent en cépages secondaires
Pour les vins rouges :
• Le Duras : c’est un des plus anciens cépages réhabilités depuis 20 ans. Il donne à la fois couleur, souplesse et finesse au vin, et il se caractérise principalement par des arômes rappelant le poivre ou les épices.
• Le Braucol : appelé également Fer Servadou, ce cépage donne un vin à la fois coloré, charnu et rustique. Ses arômes très caractéristiques et originaux évoquent le cassis, la framboise, la feuille froissée et le poivron.
• La Syrah : ce cépage s’adapte sur les terrains bien exposés. Utilisé avec mesure, il apporte au Gaillac charpente et une belle complexité aromatique.
• Le Gamay : c’est le seul cépage apte à élaborer le Gaillac Primeur. Il s’est très bien implanté à Gaillac et depuis de nombreuses années, il permet au Gaillac Primeur d’obtenir une reconnaissance nationale (4 fois premier du Concours National des vins primeurs, et toujours dans le peloton de tête). Il intervient aussi dans certains assemblages.
• Le Cabernet Sauvignon, le Cabernet Franc et le Merlot viennent en cépages secondaires.
Pour l’élaboration des vins, il faut :
– pour les vins blancs : minimum 15 % (chacun ou au total) de Len de l’El et Sauvignon, plus les cépages secondaires
– pour les vins rouges : minimum 60 % de Duras, plus les autres cépages
– pour les vins rosés : idem
Important : depuis quelques années, la maison des vins de Gaillac est établie dans l’abbaye Saint-Michel, à la sortie de Gaillac vers Caussade. Cet impressionnant édifice, tout fait de briques rouges, est un cadre magnifique pour l’accueil des visiteurs. Une dégustation de 6 vins est proposée gratuitement aux visiteurs, qui par la suite peuvent acquérir les vins des vignerons de l’appellation, au tarif du domaine.
DEGUSTATION
Les notes ont été reprises de la dégustation de Chalon-sur-Saône. Des notes antérieures à l’année passée ont aussi été reprises, in situ. La plupart des vins ont été conservés dans ma cave fraîche, et les vins ont été décantés selon la technique out & in.
*** Domaine LABORIE D’EMPE – Gaillac effervescent méthode Gaillacoise, NM 8,15 €
Nez de poire, pommes, notes fumées. Bonne bouche, sympa, beau fruit.
** Esprit de LABASTIDE – Gaillac blanc perlé 2008
Nez végétal, fruit, pomme verte. Bouche ronde, grasse, ample, avec des arrière-notes de buis et de cassis. La finale est bonne, et conforme à son prix. Un vin simple, trop simple, mais bon. 4,15 €
*** Château des Hourtets – Gaillac blanc sec
Sapide, frais et fruité, c’est le bon petit blanc comme on l’attend. Le prix, non retenu, est très raisonnable. PNC
***(*) Domaine des Terrisses – Gaillac blanc sec
au nez présentant des parfums végétaux, d’anis et de fleurs. La bouche est bonne pour accompagner la table, complète et longue. PNC
*** Domaine PLAGEOLES – Gaillac blanc sec « Mauzac vert » 2007
Nez de compote de pommes fraîche. Bouche sympa, sans plus. Dans un style trop personnel, comme d’habitude, avec de petites notes oxydées. 8,25 €
***(*) Domaine Expérimental de Gaillac – Gaillac blanc sec « L’en de l’El » NM
Nez très complexe, notes d’amandes fraîches, de nougat, de miel. Belle bouche aromatique, sympa, à boire à la fraîche, en terrasse, avec des copains. 8,50 €
*** Domaine VAYSSETTE – Gaillac rouge 2004
Au nez de fruits rouges, souvent discret dans sa jeunesse. La bouche est harmonieuse et aromatique, honnête et sapide. PNC
*** Domaine Salmes – Gaillac rouge « cuvée Liguory » 2005
Nez de sucre roux, cerise noire, un peu poussiéreux. Bouche souple, aromatique, facile, finale moyenne. 5,65 €